Deuxième marée
En 2012, vingt
auteurs taiwanais se rendent officiellement pour la première fois au Festival
de la BD d’Angoulême pour y représenter leur pays, invité d’honneur.
En 2013, une
deuxième délégation de huit auteurs taiwanais marche sur leurs pas.
En ce XXIème siècle, on serait tenté de
dire que la Terre est redevenue plate. Toutes les informations nous paraissent
accessibles, mais en réalité, cela n’est pas si évident.
Concernant les
bandes dessinées asiatiques, la France et l’Europe sont drainées presque
exclusivement par la production japonaise. Le seul mot « manga » en
est la preuve. Les œuvres venues d’autres pays asiatiques se font rares sur le
marché européen. La réciproque est également valable : les connaissances
en matière de BD françaises et européennes de la part du lectorat taiwanais ont
encore pour limite Les aventures de Tintin. Seuls les lecteurs les plus férus connaissent Moebius et Enki
Bilal.
Les échanges en
matière de bandes dessinées sont comme un retour au temps des grandes
explorations maritimes : on avance à tâtons vers l’inconnu, un inconnu où
tout paraît possible.
Les huit auteurs
invités cette année représentent le courant artistique des mangas taiwanais de
ces dernières années.
Ah Tui, au style
très personnel et riche d’une expérience confirmée dans la BD, se lance dans
les expositions artistique de la création de figurines. Chang Sheng, qui avait
embrassé une carrière dans le monde de la publicité, s’est reconverti dans la
BD ; il s’est essayé à de nombreux domaines liés à la création des oeuvres
d'art, i.e. peinture, sculpture, etc...
Hsien-Tsung Chou
publie en série de mangas dans des revues spécialisées ; il provoque joie
et rires chez les enfants à travers ses Guerriers d’Origami. Nicky Lee fait entrer le monde de la mode dans
l’univers des mangas pour jeunes filles. Quant à Min-Xuan Lin, elle donne au
club du lycée une ambiance de marché de nuit.
Les trois plus jeunes auteurs invités ont été révélés par
des dōjinshi (revues de cercle) ou se sont faits connaître par le biais de
marchés de créateurs. D’une moyenne d’âge inférieure à trente ans, certains
sont encore étudiants. Que ce soit par un style narratif propre ou par la
qualité de leurs albums reliés, ils ont tous un petit quelque chose qui les
rend si différents. M2 a choisi pour thème des histoires homosexuelles de la
dynastie Qing ; Chiyou a opté pour la mise en parallèle des courbes
féminines et de l’architecture ; quant à Ahn Zhe, qui a passé avec brio
les sélections au Concours Jeunes Talents d’Angoulême, il se démarque par un
coup de crayon hors du commun.
Chacun de ces
huit invités a su développer un style et une apparence personnels.
Grâce à cette seconde marée d’artistes, vont pouvoir se
poursuivre les échanges initiés dans le passé. Ces échanges, ouvriront-ils
l'esprit des créateurs? Ou bien raviveront-ils la passion des lecteurs? Ou
encore représenteront-ils par leur richesse une mine d’or pour les éditeurs et
pour les amateurs d'art.
En tout cas,
nous nous réjouissons de ces futures rencontres et espérons en partager les fruits.
Curateur de
Taiwan Comics
Aho HUANG
Aho HUANG