2013-01-10

Numéro spécial - Avant propos


Deuxième marée


En 2012, vingt auteurs taiwanais se rendent officiellement pour la première fois au Festival de la BD d’Angoulême pour y représenter leur pays, invité d’honneur. 

En 2013, une deuxième délégation de huit auteurs taiwanais marche sur leurs pas. 

En ce XXIème siècle, on serait tenté de dire que la Terre est redevenue plate. Toutes les informations nous paraissent accessibles, mais en réalité, cela n’est pas si évident. 

Concernant les bandes dessinées asiatiques, la France et l’Europe sont drainées presque exclusivement par la production japonaise. Le seul mot « manga » en est la preuve. Les œuvres venues d’autres pays asiatiques se font rares sur le marché européen. La réciproque est également valable : les connaissances en matière de BD françaises et européennes de la part du lectorat taiwanais ont encore pour limite Les aventures de Tintin. Seuls les lecteurs les plus férus connaissent Moebius et Enki Bilal.

Les échanges en matière de bandes dessinées sont comme un retour au temps des grandes explorations maritimes : on avance à tâtons vers l’inconnu, un inconnu où tout paraît possible.
Les huit auteurs invités cette année représentent le courant artistique des mangas taiwanais de ces dernières années.

Ah Tui, au style très personnel et riche d’une expérience confirmée dans la BD, se lance dans les expositions artistique de la création de figurines. Chang Sheng, qui avait embrassé une carrière dans le monde de la publicité, s’est reconverti dans la BD ; il s’est essayé à de nombreux domaines liés à la création des oeuvres d'art, i.e. peinture, sculpture, etc...
Hsien-Tsung Chou publie en série de mangas dans des revues spécialisées ; il provoque joie et rires chez les enfants à travers ses Guerriers d’Origami. Nicky Lee fait entrer le monde de la mode dans l’univers des mangas pour jeunes filles. Quant à Min-Xuan Lin, elle donne au club du lycée une ambiance de marché de nuit.

Les trois plus jeunes auteurs invités ont été révélés par des dōjinshi (revues de cercle) ou se sont faits connaître par le biais de marchés de créateurs. D’une moyenne d’âge inférieure à trente ans, certains sont encore étudiants. Que ce soit par un style narratif propre ou par la qualité de leurs albums reliés, ils ont tous un petit quelque chose qui les rend si différents. M2 a choisi pour thème des histoires homosexuelles de la dynastie Qing ; Chiyou a opté pour la mise en parallèle des courbes féminines et de l’architecture ; quant à Ahn Zhe, qui a passé avec brio les sélections au Concours Jeunes Talents d’Angoulême, il se démarque par un coup de crayon hors du commun.

Chacun de ces huit invités a su développer un style et une apparence personnels.

Grâce à cette seconde marée d’artistes, vont pouvoir se poursuivre les échanges initiés dans le passé. Ces échanges, ouvriront-ils l'esprit des créateurs? Ou bien raviveront-ils la passion des lecteurs? Ou encore représenteront-ils par leur richesse une mine d’or pour les éditeurs et pour les amateurs d'art.

En tout cas, nous nous réjouissons de ces futures rencontres et espérons en partager les fruits.

Curateur de Taiwan Comics
Aho HUANG